NRJ : au-delà des chiffres (Securibourse)

par Graham ⌂ @, vendredi 28 mars 2008, 23:24 (il y a 6080 jours) @ velise
édité par Graham, samedi 29 mars 2008, 00:00

Bonjour à tous,

Pardonnez ma lenteur à répondre. J’étais en déplacement professionnel et je disposais de peu de temps pour consulter le forum. Merci d’abord pour vos commentaires qui témoignent votre intérêt à mon égard. Quelques commentaires m’ont amusé et fait sourire. J’observe un lieu commun : l’assurance que les cours boursiers sont un reflet juste de la réalité économique de la vie des sociétés, et d’autre part, que la vérité émanerait systématiquement des sanctions boursières provisoire du marché, qu’elles fussent positives ou négatives. Permettez-moi de réaffirmer ne pas partager ces opinions et de conserver une assise sereine. Avant d’aborder un peu nrj, j’aborderai un peu mes performances passées et signalerai derechef sommairement quelques uns des principes qui font ma méthode.
Depuis mai 2007, soit ma meilleure performance, ma performance réelle est négative d’environ 28%, soit environ 5% de plus que le CAC 40 et environ autant du mid and small 190 que je prends comme référence préférentielle. Je suis investi en actions à presque 100% de mon patrimoine depuis environ 3 ans. Je le resterai les prochaines années malgré l’environnement économique dégradé. Depuis début 2007, ma performance est positive d’environ 35%, ce qui dépasse largement ce qu’ont fait les indices et ce dont beaucoup pourraient se targuer. Il y a 13 ans, j’étais pauvre, sans emploi, sans domicile, sans patrimoine, ni revenu, ni assistance. Etant parvenu à trouver un travail mal rémunéré, pour pouvoir me constituer un capital, j’ai travaillé comme un forcené pendant près de trois ans avec une moyenne d’heures de travail mensuelle comprise entre 250h et 280h. Mon capital initial constitué, j’ai réfléchi à le valoriser au mieux, en partant de connaissances totalement nulles dans le domaine. En huit ans, à la suite d’investissements immobiliers puis d’investissements boursiers, en plein crash quand tous s’occupaient à vendre pendant que j’achetais à des prix dépréciés, mon capital a été multiplié par plus de 6 (par 9,5 à mes plus hauts). Mon patrimoine représente aujourd’hui plus de 15 années de mon salaire actuel. La chance du joueur m’a donc souvent souri. Elle le fera encore dans l’avenir. Je n’en doute pas. Ma méthode est toujours la même. Elle consiste à identifier des actifs dépréciés, à les acheter quand personne n’en veut, à oser la concentration si la réflexion me conduit à penser avec un degré de certitude assez important que le rapport de probabilité entre le risque de perte et le risque de gain est disproportionné en ma faveur. Le risque ne réside jamais dans la concentration tant que l’on sait ce que l’on fait. Plutôt le risque primordial consiste dans la mauvaise compréhension des choses que l’on fait. Que l’on soit investi avec 5 lignes seulement, 10 lignes, 20 lignes ou même 100, on n’en est pas plus diversifié. J’exagère le trait volontairement. Avec cinq titres bien appréhendés et aux secteurs très différents, on est mieux diversifié qu’avec 40 titres que l’on comprend mal. C’est pourquoi les indices font à peine mieux que moi depuis 1 an et bien moins depuis 8. Je suis toujours autant confiant dans ma capacité à surperformer dans la durée nettement les indices et dans ma capacité à gérer au mieux mes intérêts. Les mouvements de cours qui affectent le titre NRJ ne m’ébranlent pas. Je n’y vois guère plus que mécompréhension et conditions techniques des marchés dégradés. Mon objectif étant assez lointain, il est normal que ma performance à court terme sur NRJ soit volatile et provisoirement le fait de l’émotion et/ou de la volonté d’autrui, par exemple les contraintes techniques défavorables qui affectent actuellement les fonds gênés par la crise. La volatilité est alternativement favorable ou son contraire, cela quelque soit la justesse de l’opinion. Ceci est le fait normal des marchés boursiers. Quelquefois on en profite vite (Acadomia l’an passé), quelquefois on en pâtît provisoirement (NRJ aujourd’hui). C’est la règle. Hé bien, j’y consens tout à fait sans réserve, tant qu’à la fin je m’y retrouve avec gain. Je ne mesure pas ma capacité à surperformer à l’excès des réactions des autres agents économiques. Ce serait déraison ou panurgisme. Non, les cours boursiers ne sont pas systématiquement un reflet juste de la réalité économique des sociétés. Ainsi, ces cinq derniers mois, j’ai perdu virtuellement un peu plus de 5 années de salaire. La perte pourrait sembler considérable. Beaucoup, sans doute, y réagirait fort mal. Je ne suis pas trop troublé, étant parfaitement conscient que mes choix d’investissements impliquent une volatilité élevée, tantôt favorable, tantôt défavorable, compensée par un potentiel accru. L’essentiel n’est pas dans les cours. Les cours sont le reflet de l’imagination de la multitude. L’essentiel réside dans l’effort de lucidité et de compréhension de ce qui est, et dans la justesse des approximations anticipatrices. Je sais ce que je fais.

Passons à NRJ.
Au risque de paraître provocateur, ou de laisser d’aucuns croire que je me persuade à la façon de Coué, je considère le résultat opérationnel, en forte baisse à 35 m€, plutôt qu’à 43 ou 44 m€ comme attendus par les analystes, comme assez anecdotique. Tout cela était dans l’ordre du possible, même, si j’en conviens, j’espérais mieux. Détaillons.
Le ROC des radios françaises baisse nettement de 40% environ à 67,7 m€ sous l’effet conjugué de la baisse générale du marché publicitaire du média radio, du fléchissement d’audience, d’augmentation des coûts publicitaires pour relancer l’audience, d’augmentation des frais généraux pour mettre en place une structure adaptée au changement de format du groupe. L’opinion commune affirme le déclin du média radio au profit d’Internet et le déclin d’audience des chaînes musicales au profit des webradios. Toutes les études montrent le lien étroit qui unit la radio à Internet et la communauté de clientèle de ces deux médias. La réactivité du média radio, l’utilisation encore intensive qu’en a la population en fait un média pérenne malgré sa baisse conjoncturelle et passagère qui tient beaucoup à la fois à la mode (préférence passagère d’autres médias) et à la situation économique actuellement dégradée. Passées ces variations, irrégulières comme l’est toute activité économique, le chiffre d’affaires et les résultats devraient retrouver les années prochaines un niveau normatif de 80m€ à 110m€. La concurrence à terme des webradios présente un risque réel. C’est pourquoi le groupe a considérablement augmenté le nombre de celles offertes au public internaute. Il est remarquable de noter que peu d’autres radios ont jusqu’alors réalisé pareils investissements. La diversité et la spécificité de toutes les webradios proposées par le groupe devraient suffire à satisfaire toute sorte d’auditeurs. Aussi, j’imagine plutôt à terme une complémentarité des activités tirée des radios traditionnelles et des nouvelles webradios qui permettra la préservation des revenus provenant originellement des seules radios. Cependant, je suis parfaitement d’accord pour reconnaître le risque important à terme de désaffection de l’auditorat d’nrj au profit d’autres groupes, comme RTL, Virgin ou Skyrock par exemples. Cela me parait le risque majeur. Par contre, il ne me paraît pas évaluable. Aussi, seules les variations d’audience ces prochains trimestres seront de nature à me faire reconsidérer ma position sur la capacité du groupe à pérenniser ces revenus traditionnels. Mais que les revenus baissent provisoirement ne m’inquiètent pas plus que cela. Ceci est connu depuis plusieurs mois. Il me semble utile de rappeler la valeur vénale que pourrait représenter les radios françaises. TF1 a crû récemment y trouver un moyen de se diversifier. Les seules radios françaises devraient pouvoir se vendre, malgré les conditions dégradées actuelles, au moins 700-800 m€.
Je n’évoque pas les radios étrangères. Leur importance est pour lors négligeable et marginale. Ce qui ne sera plus le cas si la marque de nationale s’européaniserait. Ce qui n’est pas impossible à échéance longue.
Abordons Internet. Le groupe a pris du retard. C’est indéniable. Néanmoins, les visites uniques sont loin d’être négligeables et leur potentiel d’augmentation important bien que n’allant pas de soi. Tout dépendra de l’attractivité de certains nouveaux sites, comme le portail communautaire (imitation du skyblog), nrjstudios, etc. Les concepts ne sont pas forcément novateurs mais il reste suffisamment de place pour un nouvel entrant. On néglige la force de la marque auprès de nombreux jeunes encore. Les sites devraient rapidement accroître leur fréquentation.
Venons-en à la téléphonie. Que n’entend-on pas sur cette activité qui, pourtant, devrait rendre à tous évident l’opportunisme du groupe. Ainsi que je le disais depuis quelques mois, ce que confirme aujourd’hui le DG du groupe dans sa présentation aux analystes, NRJ n’a jusqu’alors rien déboursé pour la développer. En effet, seul son partenaire, le CM-CIC, pour entrer au capital a avancé 90 m€ pour les premiers développements. A ce jour, NRJ Group est propriétaire pour moitié d’une base de clientèle, non négligeable, même si elle n’est pas encore rentable, sans avoir rien payé. C’est dire donc que la marque NRJ a une certaine valeur (pour qui veut bien comprendre au-delà des idées reçues immédiates). Le groupe décidera au cours des mois prochains, et selon la progression du nombre d’abonnés, s’il investira en capital ou non. C’est remarquable. Les risques sont considérablement amoindris pour un bénéfice hypothétiquement appréciable. Bien évidemment, les analystes s’attarderont à relever les effets sur le ROC global sans accorder d’importance à ce que signifie vraiment les deux profits de dilution dues à l’entrée au capital du CM-CIC d’abord à hauteur de 10% puis de 40 autres %. Quelle négligence ! Penser aussi que ce n’est pas pour rien que la direction a choisi de publier pour la première fois la faiblesse des revenus tirés de cette activité. Elle sait la marge de progression et l’effet d’annonce qu’en son heure cela provoquera.
Abordons le développement dans la TV. Là encore, on remarque la faiblesse des propos communs. Cette activité a à peine deux ans et on la voudrait déjà rentable. A-t-on déjà oublié combien de temps a mis M6 avant d’être rentable, ou encore jadis Canal + > Il semblerait. On ne voit encore que les effets immédiats sur le ROC et on oublie qu’en comptabilité, des investissements peuvent apparaître en charges quand la réalité économique en fait des immobilisations non comptabilisées, bien que réelles. Ces charges initiales forment les survaleurs incorporelles de demain. C’est exactement pareil que ce que j’affirmais l’an dernier pour Acadomia et qui depuis a été avéré. L’ambition du groupe est de parvenir à une part d’audience de 3% pour NRJ12 au moment de la généralisation de la TNT. L’objectif est modeste et sera sans difficulté dépassé. Il suffit par règle de trois, augmentée d’une décote importante de précaution, de calculer proportionnellement sur la base des résultats de M6 ce que seront les résultats prochains de la nouvelle chaîne. Oublie-t-on encore combien sont convoitées ses chaînes et combien elles risqueront d’être valorisées par d’autres grands groupes lors de la première consolidation du secteur > Il y un an les analystes valorisaient l’autorisation d’émission des nouvelles chaînes TNT à au moins 100m€ chacune. Il est indubitable que cela vaut au moins cela, rentable ou pas. L’autorisation d’émission sur Paris a également une valeur vénale immédiate avant même aucun développement.
Qu’en est-il de l’activité de diffusion, TowerCast > Formidable future machine à cash une fois les importants investissements nécessaires réalisés. D’où la nécessité de partenariat. On ne doute pas que le groupe saura trouver aisément un partenaire industriel sans négliger son intérêt. Là encore, on ne perçoit pas que la rentabilité d’exploitation est obérée par des investissements comptabilisées en charges, qui plus tard disparaîtront pour permettre une rentabilité très élevée, favorisée par la quasi absence de concurrence . L’an dernier, les analystes valorisaient TowerCast a environ 80m€.
J’évoquerai à peine le hors médias. Rien de plus irrégulier. Pourtant, à intervalles plus ou moins espacés, ceux-là gonflent les résultats de l’ensemble.
On le voit, le cours de l’action est déconnecté des fondamentaux. Les raisons en sont simples. Manque de profondeur dans la vision de ceux qui observent (analystes ou autres). Compréhension réduite. Panurgisme commun aux marchés financiers. Etroitesse du flottant du groupe qui a pour conséquence immédiate, une volatilité accrue, correspondante aux difficultés de toutes les sociétés de gestion de fonds pour arbitrer en période de sortie importantes de capitaux à gérer. Les gérants vendent pour faire des liquidités. Comme les perspectives des performances financières à court terme ne sont pas fameuses, les fonds préfèrent sortir d’un titre que rien ne soutient à court terme et qui amplifie les effets de la crise. Tout cela n’est que conjoncturel. Si NRJ réussit dans son plan de développement, son cours quadruplera par rapport à ses plus bas à horizon de 7-8 ans. Si NRJ échoue (ce qui reste aussi envisageable), le cours, passée la crise financière, retrouvera une valorisation adéquate à sa position dans le marché radio, soit environ le double de sa valeur actuelle. Le pire serait une désaffection de son public traditionnel. Cela est possible. Mais de loin, cela n’est en rien pour lors vérifier. Le risque réel est faible et le potentiel est important. NRJ constitue au cours actuel une magnifique opportunité d’achat, avec un rendement appréciable permettant d’attendre le développement des nouvelles activités.
Il faut savoir prendre un peu de hauteur et reconnaître ses erreurs. Sans doute, ai-je été trop vite enthousiasmé par le potentiel important de la société. J’ai fait preuve d’un manque de compréhension important dans les ressorts techniques et psychologiques qui pourraient affecter l’évolution du cours à court terme. Je n’ai point su me rendre compte que tout disposait à la poursuite de la chute du titre et j’ai investi trop tôt (pru de 9€, investissement représentant environ 35% de mon patrimoine). Je manquerai par cette négligence une grande part de la hausse. Erreur de précipitation. Je ne regrette néanmoins aucunement ma concentration en ce titre parce que je convaincu (par Coué ou pour d’autres raisons plus valables, qu’importe !) qu’il présente bien des signes de l’investissement remarquable : risque faible pour potentiel important. J’aime cet esprit d’entreprise que le marché considère comme une succession d’erreurs stratégiques. Je finis par quelques points qui restent, quoique l’on puisse dire vrais. La société reste rentable. Elle a une situation financière très saine qui lui permet d’investir pour une bonne part de façon autonome sans avoir besoin ni du marché ni des banques. La direction est honnête, opportuniste et je dirai même compétente malgré quelques errements de débuts inévitables. Nrj traverse ce que son DG nomme justement une crise de croissance. Et comme chacun sait, ce qui ne tue pas rend plus fort. J’ose croire que Bimbo saura être équitable si dans quelques années ma vue s’avérait juste. En ce cas, j’espère un éloge à Coué !

Cordialement et bon W-E.

--
[image]





Graham


Fil complet:

 Fil RSS du sujet

powered by my little forum