Trop tôt pour partir à la chasse aux bonnes affaires (Securibourse)
Journal des Finances n° 6308
Trop tôt pour partir à la chasse aux bonnes affaires en Bourse
La tendance reste résolument baissière.
Evitez de vous mettre en travers du marché
ROLAND LASKINE - JDF HEBDO - 25.10.2008
Les boursiers les plus aguerris n'en croient pas leurs yeux.
Comment le marché peut-il continuer de baisser avec des cours déjà si bas >
Qui aurait cru que des valeurs d'aussi bonne qualité qu'Alstom, Technip,
Lafarge ou Carbone Lorraine, déjà très affaiblies par plus d'une année de
baisse quasi ininterrompue, rechuteraient encore de 40 à 50 % au cours du mois d'octobre >
La réalité quotidienne des marchés tranche avec l'optimisme des investisseurs particuliers et des professionnels qui estiment que les valorisations ont atteint un point bas à partir duquel les cours ne peuvent que rebondir.
Vous avez tous raison sur le plan fondamental, mais le marché n'en a cure.
Ce vendredi, l'indice CAC 40 a enfoncé à mi-séance les 3.000 points, revenant à ses plus bas niveaux depuis juillet 2003.
Toujours les ventes forcées
L'écart existant entre la réalité du marché et les données fondamentales s'explique par le fait que nous sommes dans un marché de flux.
Les actions croulent sous le poids des ventes forcées des grandes institutions financières en mal de liquidités, des fonds d'investissement débordés par les demandes de rachat et surtout par des fonds d'investissement spéculatifs (les fameux hedge funds).
Certains d'entre eux, étant au bord de la faillite, sont contraints de liquider leurs lignes de titres à n'importe quel prix.
Les chiffres qui circulent sur le marché font état de 200 faillites de fonds depuis le début de l'année sur les 2.000 existants. Ces derniers auraient déjà rendu 31 milliards de dollars à leurs clients, ce qui porte à 1.720 milliards leurs encours à fin septembre.
Les ventes forcées ne sont sans doute pas terminées, car il y aurait encore pour 500 milliards de dollars d'actifs à liquider. Fort heureusement, il n'y a dans le lot qu'une minorité d'actions, car cette classe d'actifs n'est pas le terrain de jeu préféré des hedge funds.
Mais la baisse des cours n'est hélas pas seulement alimentée par les ventes forcées.
Elle s'explique aussi par un contexte économique de plus en plus perturbé.
Les commandes de biens durables sont en forte baisse dans la zone euro, l'activité plonge dans les pays émergents, en tête desquels se situe la Chine, et le chômage explose aux Etats-Unis, ce qui ne laisse rien augurer de bon à court terme.
Fait nouveau, les entreprises commencent elles aussi à être touchées par le ralentissement de l'activité.
Aux Etats-Unis, plusieurs grands groupes, comme Boeing, Merck, Sony ou UPS, ont annoncé de forts reculs de leurs bénéfices trimestriels, alors qu'en Europe les avertissements sur résultats se multiplient.
Dans ce contexte, il ne fait aucun doute que la tendance de fond soit fondamentalement baissière. La chute récente des cours des plus grandes valeurs de la cote montre qu'aucun secteur n'est épargné.
Contrairement à toute attente, ce sont depuis peu les valeurs les plus défensives qui ont subi les attaques les plus violentes.
Comme nous le répétons depuis plusieurs semaines, les investisseurs particuliers n'ont pas intérêt à jouer contre la tendance, même si d'un point de vue fondamental à peu près toutes des valeurs de l'indice CAC 40 se traitent aujourd'hui à des cours d'achat.
Il sera toujours temps de revenir progressivement à l'achat lorsque la tendance sera réellement orientée à la hausse.
Mieux vaut prendre le train en marche plutôt que sacrifier inutilement ses liquidités à la recherche d'un hypothétique point bas...
L'or perd, à court terme, ses soutiens traditionnels
La stratégie consiste donc à résister à la tentation de renforcer la part des actions en croyant que la chasse aux bonnes affaires est ouverte.
L'heure serait plutôt au maintien des positions, en guettant les rebonds qui ne manqueront pas de se présenter dans les jours et le semaines à venir. Ceux-ci constitueront autant d'occasions d'alléger les positions afin de renforcer la part des liquidités.
Le contexte actuel de récession sur fond de ralentissement général de l'activité impose en revanche de revoir l'allocation globale d'actifs en réduisant à 10 % la part du portefeuille consacrée à l'or.
A court terme, celui-ci est en effet privé de ses soutiens habituels qui sont l'inflation et la baisse du dollar.
Mieux vaut orienter ses placements obligataires vers des fonds spécialisés dans les obligations privées (les corporate, dans le jargon des spécialistes) qui offrent des rendements très attrayants, proches de 6 %,
avec des risques limités puisque ceux-ci sont surtout présents sur les emprunts émis par les banques, qui disposent aujourd'hui de la garantie des Etats.
Réduisez l'or au profit des fonds orientés sur les obligations privées.
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