Plus çà change…(Oddo 23/09/08) (Securibourse)

par J.L. @, mercredi 24 septembre 2008, 14:34 (il y a 5899 jours)

Flash stratégie
mardi 23 septembre 2008
Plus çà change…
Violent rebond de l’appétit pour le risque en fin de semaine dernière,
affaiblissement du dollar, reprise du pétrole et des matières premières : on
aurait presque le sentiment aujourd’hui d’être revenu plusieurs mois en arrière si ce n’était les signes encore visibles de stress profond sur les
marchés interbancaires. Le plan Paulson marque une étape importante,mais il ne peut pas, à lui seul, jouer le rôle de l’éponge magique et on peut craindre de nouvelles répercussions de la crise financière sur l’économie
réelle à travers le mécanisme du crédit. Nous restons donc circonspects à
ce stade. D’un point de vue tactique, le secteur des utilities nous paraît
attractif après sa sous-performance des derniers mois dans un contexte de
stabilisation, voire de légère reprise du cours du baril.

Retour sur le plan Paulson : il est bienvenu mais ce n’est pas
l’éponge magique
Un large consensus s’est formé ces derniers jours pour estimer que le plan
proposé par le secrétaire au Trésor américain était une étape importante
dans la résolution de la crise financière : c’est une approche stratégique et
non plus seulement tactique. Elle ne peut que jouer positivement sur la
liquidité des marchés et la confiance des acteurs en fournissant un plancher
de dernier ressort sur les prix des actifs qui font le plus problème.
Nous partageons cette opinion, mais il nous semble beaucoup trop tôt pour
en conclure qu’il constitue une avancée décisive vers la sortie de crise :
a) Le montant total avancé de 700 Md$ est conséquent, mais doit être mis
en rapport avec le mouvement de fond de dégonflement de la sphère financière aujourd’hui amorcé et les ordres de grandeur des stocks de dettes aux états-Unis (dette hypothécaire totale : 12 000 Md$, dettes des
acteurs financiers : 15 000 Md$). Ces 700 Md$ ne sont pas d’un ordre de
grandeur différent des 400 Md$ d’actifs en provenance des S&L que le RTC
avait récupérés en 1989 : les ordres de grandeur des deux crises sont-ils eux
réellement comparables >
b) Les difficultés de mises en oeuvre du plan ne doivent pas être sousestimées.
Au-delà des difficultés inhérentes aux arbitrages politiques et aux conflits d’intérêt potentiels entre gestionnaire du fonds et intervenant financier, se pose le problème de la complexité des produits incriminés qui débordent pour une large part des simples prêts hypothécaires ou même des CDO à base de prêts subprimes. Quid des dérivés de crédit notamment >
c) Enfin, et c’est, selon nous, le point le plus important, le plan ne traite pas du sujet de la recapitalisation nécessaire des institutions financières au
fur et à mesure que de nouvelles dépréciations sont constatées. La mécanique d’apport d’argent frais s’est bloquée de manière ostensible ces derniers ois, attisée en partie par la crainte d’une intervention fédérale ultra-dilutive (précédents Fannie Mae, Freddie Mac et AIG) et il est à craindre que la problématique de recapitalisation ré-apparaisse à la faveur de la mise en place du plan. L’utilisation d’une procédure de reverse auction pour les rachats de papier toxique pourrait conduire à favoriser les institutions les
moins malades dans la mesure où elles seront les plus à même de solder de
manière drastique leurs actifs les plus dévalorisés : elles vont par ricochet
accentuer la pression sur les institutions aux bilans les plus fragiles.Il n’est pas sûr qu’un simple relâchement des règles prudentielles – évoqué de plus en plus çà et là – permette de faire l’économie de nouveaux sauvetages
publics.

La question n’est plus de savoir si le point bas de jeudi dernier était le
bon : le retour violent de l’appétit pour le risque vendredi nous laisse
perplexe pour la suite.
Alors qu’on pouvait discerner jeudi des signes d’une capitulation plus
profonde des marchés Actions (en Europe : rendement des dividendes sur le DJ Stoxx hors banques au même niveau que les obligations d’État à 10 ans, ré-alignement clair des performances sectorielles depuis le début de l’année
sur le clivage cycliques/défensives aux États-Unis : VIX au-delà de 35), le rebond violent de vendredi nous en éloigne d’un coup et ce, d’autant plus
qu’il traduit une forte reprise de l’appétit pour le risque : rally des financières certes mais aussi des cycliques dures telles que métaux mines et biens d’équipement.
On revient d’un coup plusieurs mois en arrière en termes de rotation sectorielle et d’appréciation du risque… est-ce vraiment justifié >
La clé pour les mois à venir, c’est l’évolution de l’économie réelle… toujours difficile d’être optimiste
Au-delà du risque systémique de crise financière, c’est bien évidemment
l’évolution de l’économie réelle qui importe le plus pour les marchés Actions.
Il est difficile de penser aujourd’hui que l’intervention des pouvoirs publics
américains suffira à éviter de nouveaux effets induits sur la sphère réelle liés à la crise de ces derniers jours. Le mécanisme du crédit semble durablement affecté à ce stade et ce, malheureusement à l’échelle de l’économie mondiale. Il n’est qu’à voir la facilité apparente avec laquelle certains marchés émergents ont donné des signes de stress violent la semaine
dernière… réminiscents dans certains cas de la crise de la fin des années
90.
Pétrole, dollar, risques sur les financières : attention au retour
des vieux démons sur les marchés européens
Les mouvements des cours des autres actifs financiers que les actions
depuis le rebond de vendredi ne sont pas encourageants et ce, tout
spécialement pour les marchés européens.
Le dollar est reparti à la baisse face à l’euro, l’ampleur potentielle de l’impact de la crise pour le budget américain suscitant des interrogations croissantes.
C’est évidemment négatif pour les actions européennes et notamment les
secteurs à valeur dollar.
Plus surprenant, le rebond du pétrole qui provient, selon nous, plus d’un
arbitrage financier de court terme face au regain de défiance sur le dollar que d’une appréciation plus positive des perspectives de la croissance mondiale
(notons que l’or suit le pétrole à la hausse) remet en cause le desserrement
de la contrainte de pouvoir d’achat observée ces dernières semaines avec la
décrue des cours. Cela remet en lumière le risque fort, à ce stade, sur les
secteurs de consommation discrétionnaire éminemment cycliques. En revanche, cela milite pour une redécouverte du secteur des utilities qui nous paraît fondamentalement attractif après sa vague récente de sousperformance et présente un caractère défensif évident.
Enfin, les taux longs ne remontent pas seulement aux États-Unis ces derniers jours mais aussi en Europe et ce, alors que seuls les États-Unis semblent décidés à utiliser massivement l’arme fiscale pour contrecarrer la crise bancaire. On peut penser que cette remontée des taux longs est le pendant logique sur le court terme à la ré-appréciation des actions. On peut aussi penser que cette remontée des rendements en sympathie avec le marché des emprunts d’État américains traduit la possibilité grandissante d’une intervention plus visible des pouvoirs publics européens. En effet, il n’est pas exclu que l’attention se focalise plus désormais sur la santé des institutions financières européennes qui ont aussi leurs propres sources de vulnérabilité au-delà de la crise américaine : crise immobilière encore en phase de déclenchement dans nombre de pays, vulnérabilité intrinsèque des marchés du crédit dans les pays d’Europe centrale après l’expansion débridée de ces dernières années.
:-) :-)

Fil RSS du sujet
powered by my little forum