La Fed est peut-être encore trop optimiste 18/02/2008 15:42 (Securibourse)
Dan Molinski,
DOW JONES NEWSWIRES
NEW YORK (Dow Jones)--On peut juger l'économie dangereusement proche d'une récession lorsque les perspectives de croissance jugées médiocres par le président de la Réserve fédérale sont considérées comme encore trop optimistes par les observateurs.
Dans son discours devant le Sénat jeudi, Ben Bernanke a présenté une vision maussade de l'économie. Le président de la Fed a indiqué que son scénario de base prévoit une amélioration de la situation plus tard cette année, après une croissance qualifiée de "poussive". Il a également mis en garde contre les risques baissiers sur ce scénario.
Aux yeux de la plupart des observateurs, ce discours était plutôt négatif. Les marchés boursiers se sont repliés et le dollar, qui avait progressé au cours des dernières semaines, a brutalement interrompu son ascension.
Cependant, certains économistes jugent que les perspectives de Ben Bernanke ne sont pas suffisamment sombres étant donné la situation actuelle.
"Les perspectives économiques à court terme ne sont pas aussi roses que ne le laissent supposer la croissance poussive évoquée par Ben Bernanke", estime Brian Bethune, économiste spécialiste des Etats-Unis chez Global Insight.
Certes, Ben Bernanke a précisé qu'il existait des risques que le marché immobilier ou le marché de l'emploi se détériorent davantage que prévu. A ce stade, il serait peut être temps de parler de scénario de base plutôt que de risques.
Le problème est que cela équivaudrait à reconnaître tacitement la probabilité de taux de croissance négatifs et donc à admettre que les Etats-Unis vont entrer en récession.
Une récession correspond à deux trimestres consécutifs de taux de croissance négatifs. Ni Ben Bernanke, ni aucun autre officiel n'a pour l'heure mentionné une récession dans son scénario de base.
Le président de la Réserve fédérale de Philadelphie Charles Plosser l'a presque fait en déclarant aux journalistes la semaine dernière qu'"il était vrai que les chances d'une entrée en récession avait augmenté."
Le banquier central a indiqué comme risques majeurs des pressions continues sur le système financier et la crise de l'immobilier, mais a ajouté qu'il estimait, pour le moment, que l'économie allait surmonter ces problèmes.
De son côté, Alan Greenspan, l'ancien président de la Fed a déclaré jeudi: "Nous sommes clairement au bord" d'une récession, évaluant sa probabilité à 50% ou plus.
On ne peut pas reprocher aux banquiers centraux d'éviter de dire qu'une récession est probable avant d'en être quasiment certains.
L'une des principales missions de la Fed consiste en effet à éviter une volatilité extrême des marchés financiers. Etant donné le repli des marchés aux commentaires de Ben Bernanke sur la croissance, on peut imaginer leur réaction s'il avait évoqué une récession.
En outre, aucun membre de la Fed ne veut qu'on se souvienne de lui comme de celui qui a prédit une récession, si elle n'a finalement pas lieu.
Jeudi, les statistiques ont indiqué que le déficit commercial américain s'est plus contracté que prévu en décembre, malgré la montée des prix du pétrole à des plus-hauts.
Drew Matus, économiste chez Lehman Brothers, estime que ce chiffre devrait contribuer à une révision en baisse de la croissance au quatrième trimestre.
L'économie américaine a déjà freiné l'automne dernier, avec une croissance de 0,6% seulement, selon les chiffres préliminaires. Une révision en baisse de la croissance au quatrième trimestre pourrait donc être déterminante et donner le signal d'une entrée en récession.
Les chiffres du déficit commercial indiquent également que, comme espéré, le dollar faible semble aider l'économie américaine en soutenant les exportations.
Les exportations américaines ont progressé de 1,5% à 144,32 milliards de dollars en décembre, contre 142,15 milliards de dollars en novembre, tandis que les importations se sont repliées.
Ian Shepherdson, économiste en chef pour les Etats-Unis chez High Frequency Economics, note que seules les exportations évitent une entrée en récession.
Par ailleurs, la Fed et le gouvernement américain ont engagé des efforts pour stimuler l'économie. La banque centrale est prête à poursuivre son assouplissement monétaire, tandis que le plan de relance du gouvernement devrait donner un coup de pouce à la croissance.
La consommation des ménages est considéré comme l'élément clé dans la lutte contre la récession, mais les derniers chiffres de l'enquête de confiance des ménages de l'Université du Michigan sont maussades.
L'indice a reculé à 69,6 en février, contre 78,4 en janvier.
"Cela représente un plus-bas depuis janvier 1992 et si cela devait durer, cela correspondrait à une stagnation totale de la consommation des ménages", commente Ian Shepherdson.
-Dan Molinski, Dow Jones Newswires
Fil complet: