Les risques de 2008 (Investir) (Securibourse)

par Bobo, samedi 19 janvier 2008, 16:45 (il y a 6149 jours)

ENQUÊTE * Samedi 19 janvier 2008 * Investir n° 1776 p.20

Le début d’année catastrophique pour les marchés financiers est entretenu par les doutes concernant la capacité de l’économie mondiale à surmonter rapidement les difficultés qui se sont révélées en 2007. Nous dressons un tableau des principales menaces qu’il faudra guetter et analyser en 2008, à commencer par les conséquences de la crise des «subprimes».

Le décrochage très marqué des principaux indices boursiers du monde depuis le début de l’année semble avoir fait l’effet d’un coup de massue sur les investisseurs. Un sentiment de morosité remplace peu à peu l’inquiétude puis le soulagement qui avaient fait suite à l’éclatement de la bulle des crédits immobiliers aux Etats-Unis à la fin de l’été. L’année 2008 s’annonce donc particulièrement difficile, car un certain nombre de risques majeurs pourraient se concrétiser.

Ces risques sont notamment explicités dans la version 2008 du rapport annuel des experts du World Economic Forum, consacré aux risques globaux. Pas moins de 26 risques fondamentaux pour l’économie mondiale y sont identifiés et classés en fonction de leur probabilité d’occurrence et de leur sévérité (voir ci-contre). Même si les critères de classification peuvent être discutables, il n’en ressort pas moins de cet exercice que trois menaces se distinguent comme les plus redoutables :
l’effondrement des valeurs d’actifs, la flambée des cours du pétole (et des matières premières en général) et le ralentissement économique de la Chine (et des autres pays émergents).

[image]

Nous nous proposons de passer en revue ces différents risques mais aussi les opportunités éventuelles qu’ils recèlent au cours des prochaines semaines, en commençant ici par l’éclatement de la bulle des crédits immobiliers aux Etats-Unis, à l’origine de l’effondrement des valeurs d’actifs.

Yann Morell y Alcover

Des perspectives bien sombres pour le marché résidentiel aux Etats-Unis

Les chiffres publiés début janvier par la Mortgage Bankers Association (MBA) en attestent : le marché immobilier devrait poursuivre son affaissement en 2008 (graphique n° 1).

[image]

La baisse attendue des volumes et des prix de transactions de maisons existantes est d’autantplus inquiétante qu’elle viendra aggraver la situation financière de ménages déjà surendettés. Les taux de défaillance devraient mécaniquement continuer de progresser pour tous les types d’emprunts d’accordés aux ménages et notamment les prêts immobiliers accordés aux plus fragiles, les tristement célèbres subprimes. Fin 2007, les taux de défaillance, pour les emprunts subprimes contractés à taux variable, frisaient les 20 % (graphique n° 3). Leur hausse était certes observée depuis plus de deux ans mais c’est l’accélération du phénomène qui surprend. Plus inquiétant, les taux de défaillance se sont aussi clairement redressés pour les prêts subprimes contractés à taux fixe (graphique n° 3),

[image]

signe de la fragilité financière des emprunteurs. Selon un rapport du Joint Economic Committee du Sénat états-unien publié en octobre, les saisies liées aux emprunts subprimes devraient atteindre les 2 millions entre 2007 et 2009, provoquant une destruction de richesse pour les ménages évaluée à plus de 100 milliards de dollars. Or, ce chiffre aurait déjà été atteint en janvier selon les déclarations du président de la Réserve fédérale des Etats-Unis, jeudi soir, ce qui porte à croire que les dégâts ont été sous-estimés et que la facture pourrait encore beaucoup s’allonger. Par ailleurs, dans un marché immobilier baissier, malgré la multiplication des saisies, les banques parviennent de moins en moins à retrouver leur mise de départ, en raison des conditions déraisonnables auxquelles elles ont accordé certains crédits (taux d’effort excessif, apport personnel insuffisant voire nul, taux d’intérêt artificiellement bas les premières années, mensualités susceptibles d’augmenter fortement).
Les conséquences des excès commis jusqu’à la mi-2006 vont se prolonger, au fil des premières révisions de taux d’intérêt, au moins jusqu’à la fin de l’année pour ce qui concerne les emprunts subprimes et pourraient même se faire sentir bien au-delà pour une catégorie d’emprunts encore très difficile à cerner, les Options ARM (graphique n°6).

[image]

Il s’agit de prêts à taux variables et à mensualité flexible, parfois accordés à des ménages fragiles de type subprimes, pour lesquels il n’est même pas nécessaire, temporairement, de rembourser le montant total des intérêts, ceux non payés pouvant être capitalisés.

La crise des crédits fait place à un ralentissement économique

Ce qui avait commencé comme une crise immobilière, puis financière et boursière, semble peu à peu s’étendre à l’ensemble de l’économie des Etats-Unis. Les mauvaises statistiques économiques publiées début janvier – l’indice ISM du secteur manufacturier et les chiffres de l’emploi, notamment – sont venues confirmer le fort ralentissement de la croissance et ont renforcé la probabilité d’une récession cette année. Les résultats catastrophiques annoncés par Citigroup pour le quatrième trimestre sont venus noircir un tableau déjà bien sombre.

Difficile d’estimer les pertes

Au cours des prochaines semaines, les choses pourraient encore s’aggraver, aussi bien concernant les statistiques économiques que les annonces de provisions des grandes banques touchées par les dévalorisations d’actifs. Dans ce domaine, c’est l’incertitude la plus totale qui règne. Comme l’indique Christian Parisot, économiste à Aurel, « même le meilleur analyste financier est dans le brouillard. Il faudrait éplucher les comptes ligne par ligne pour pouvoir estimer les pertes ». La véritable étendue des dégâts provoqués dans les bilans des banques par la bulle des crédits immobiliers ne pourra donc pas être évaluée avec précision avant de longs mois, et ce d’autant plus que les abaissements de notes de produits d’investissement structurés par les agences de notation se multiplient. « Il existe des incertitudes à deux niveaux , explique Christian Parisot. D’une part, les taux de défaillance qui seront effectivement atteints et, d’autre part, la capacité de recouvrement par les banques en cas de saisie. » A cela s’ajoutent, pour les établissements les plus touchés, des coûts de refinancement fortement accrus. Au final, faire des prévisions concernant le montant total des provisions qui devraient être passées relève en partie de la divination. Les estimations les plus courantes vont de 200 à 500 milliards de dollars. Dans leur rapport semestriel, Global Financial Stability Report du mois d’octobre dernier, les experts du Fonds monétaire International estimaient à 170 milliards de dollars les pertes directement liées aux emprunts non-prime et à environ 200 milliards de dollars la baisse de valeur pour les produits financiers structurés. Même si les banques centrales européenne et états-unienne ont démontré leur volonté de tout mettre en oeuvre pour éviter une paralysie du marché des crédits, dont les conséquences seraient catastrophiques pour l’économie, les investisseurs en Bourse tablent désormais clairement sur une détérioration des performances opérationnelles des entreprises dans les prochains mois.

[image]

Nouveaux signaux négatifs

Plusieurs symptômes sont d’ailleurs venus conforter cette opinion ces derniers jours. Tout d’abord, les déclarations du directeur général de AT&T, le premier opérateur de télécommunications des Etats-Unis, le 8 janvier, concernant la « faiblesse » de ses activités grand public, sont venues démontrer qu’aucun secteur, même parmi les plus acycliques, n’était à l’abri. Ensuite, les avertissements sur les résultats lancés deux jours plus tard par les fournisseurs de services financiers, American Express et Capital One, sont cohérents avec le ralentissement de la consommation et le rebond récent des taux de défaillance constatés sur les prêts à la consommation et les cartes de crédit (voir les taux d’impayés, ci-dessus). La période de publication des résultats annuels des entreprises, qui vient de s’amorcer, devrait donc plutôt s’avérer décevante En Europe, même si aucun ralentissement concernant les crédits accordés aux entreprises ne peut être observé pour l’instant, ceux des ménages ont, eux, nettement décéléré, freinant l’un des moteurs de croissance : la consommation (voir ci-dessus). La confiance pour 2008 est sérieusement ébranlée, même si plusieurs facteurs laissent entrevoir une éclaircie d’ici à la fin de l’année, notamment les mesures d’urgence annoncées aux Etats-Unis pour venir en aide aux ménages les plus en difficulté, concernant leur emprunt immobilier, ou encore la relative bonne santé des sociétés. Aucun rebond n’est pour l’instant constaté concernant les taux de défaillance de prêts accordés aux entreprises.

--
[image]

merci pour cette analyse

par ayrton14, samedi 19 janvier 2008, 17:04 (il y a 6149 jours) @ Bobo

...

Fil RSS du sujet
powered by my little forum