Poursuite du «supercycle» des matières premières (Securibourse)
REBOND. Après le « trou dair » lié à la crise américaine du crédit, les cours ont largement rebondi.
Les perspectives pour les prochains mois demeurent bien orientées pour la majorité des produits.
Poursuite du «supercycle» des matières premières
La crise américaine du crédit a eu des effets contradictoires sur les matières premières. Dans un premier temps, les prix se sont détendus, les marchés anticipant lallégement des positions des fonds spéculatifs. Depuis, les cours ont rebondi pour la quasi-majorité des matières premières. Le meilleur exemple est le pétrole, dont les cours ont franchi temporairement, en octobre, la barre de 80 $ le baril de brent (première échéance). Ce prix nest pas considéré
comme celui qui reflète les fondamentaux économiques (environ 70 $, selon les économistes), mais il prend en compte limpact de la dépréciation du billet vert liée aux anticipations de baisse des taux dintérêt aux Etats-Unis. Pour les prochains mois, la tendance dépendra du climat durant lhiver et surtout du comportement de lOrganisation des pays exportateurs de pétrole (Opep). Un geste conséquent de sa part nest pas envisageable. Le cartel a récemment
déçu en annonçant une hausse limitée à 500.000 barils par jour de ses quotas de production au 1er novembre. Mais, même si lOpep ouvrait les vannes, les prix pourraient progresser en raison de la diminution des capacités excédentaires de production comme en 2004, craint lInstitut français du pétrole (IFP).
Hors Opep, la production devrait augmenter de 1,1 million de barils par jour (Mb/j), à 51,1 Mb/j, selon les prévisions de lAgence internationale de lénergie AIE). Celle-ci table aussi sur une croissance de la demande mondiale de 2,1 Mb/j, à 88 Mb/j, mais cette prévision est jugée surestimée par les économistes.
Bien sûr, ces prévisions sont dépendantes du rythme de croissance de léconomie américaine, principale consommatrice mondiale de brut. Un ralentissement plus important quescompté participerait à la détente du marché du pétrole. Mais la croissance de la demande de brut est davantage corrélée à lexpansion mondiale, qui restera forte, anticipée vers + 4,8 % en 2008 par le FMI, contre + 5,2 % en 2007. Le dynamisme élevé des pays émergents, tout particulièrement de la Chine, limite lespoir dun véritable repli des cours.
Le prix du plomb devrait continuer sa forte progression. Le cuivre sapprête à établir de nouveaux records.
Métaux : retour aux fondamentaux
Limpact de lexpansion débridée de la Chine est encore plus apparent pour les métaux non ferreux. Il faut toutefois noter que ces matières premières ont évolué en ordre dispersé depuis lété. « Cest une bonne nouvelle. Les fonds indiciels et les hedge funds jouent peut-être moins un rôle moteur dans la formation des cours », estime Olivier Reymondon, économiste au COE-Rexecode. Il faut ainsi faire la distinction entre les produits qui ont renoué avec la croissance des prix, après la consolidation de cet été, et les autres. Parmi les premiers, on trouve le plomb, qui bénéficie dune très forte demande. Ce métal est largement utilisé pour la fabrication de batteries dautomobiles dont le parc progresse à pas de géant en Asie.
Le cuivre bénéfice aussi dune demande asiatique particulièrement forte. Selon les experts de Natixis, la Chine premier importateur mondial de cuivre verrait ses achats progresser de 23 % cette année. Létain est également dans une situation tendue en raison dun déficit de production, notamment en Amérique du Sud.
A linverse, pénalisés par une surproduction en Chine, les cours de laluminium sinscrivent en baisse. Le marché du nickel est atypique. Après avoir fortement progressé, les prix ont chuté. Eramet envisage un excédent doffre de respectivement 20.000 et 22.000 tonnes pour les deux derniers trimestres 2007. En amont, au niveau des producteurs, 120.000 tonnes de production seraient disponibles. « Si tous ces volumes venaient sur le London Metal Exchange (LME), cela se traduirait par un quintuplement des stocks », prévient Natixis.
Enfin, le marché de lacier reste dynamique : sa croissance mondiale
devrait atteindre 6,8 % en 2007 et 2008 malgré le ralentissement de la demande aux Etats-Unis, selon lInstitut international de lacier (IISI). LEurope dénonce toutefois des exportations chinoises qui se font à « des prix de dumping », selon la Fédération allemande de lacier.
Le compartiment le plus dynamique des matières premières reste celui des céréales. Le prix des grains (maïs, blé, soja) est fortement tiré par le développement de lindustrie des carburants verts. La Chine est devenue le troisième producteur mondial déthanol et de biocarburant, rappelle Olivier Reymondon. La hausse des prix des céréales se transmet à lélevage via la hausse des coûts de production. Résultat, lessentiel de laccélération de linflation en Chine sexplique par la hausse des prix alimentaires. Un bémol toutefois pour le maïs, qui a connu une excellente récolte 2007-2008 aux Etats-Unis contrairement à lEurope, lUkraine et lAustralie. Enfin, les matières premières agro-industrielles ne sont pas en reste. Le caoutchouc bénéficie toujours de lenvolée des cours pétroliers et du développement du parc automobile asiatique, fortement consommateur de cette matière première.
Philippe Wenger
Source: Investir Hebdo n°1762 du 12/10/2007
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