valeurs défensives (Securibourse)

par thegambler, mardi 21 août 2007, 22:33 (il y a 6299 jours)

bonsoir

pour revenir sur un sujet fondamental dans cette période de grande incertitude

Air liquide évoquée récemment

Les dirigenat lisent-ils ce forum >:surprised:

AFP le 21/08/2007 19h04
Eurazeo est monté de 2,1% à 5,5% du capital d'Air Liquide

La société française d'investissement Eurazeo a augmenté sa participation de 2,1% à 5,5% dans le capital du groupe de gaz industriels et médicaux Air Liquide, renforçant ainsi sa position de premier actionnaire, selon un communiqué publié mardi.

la société oui, le titre non

par Graham ⌂ @, mardi 21 août 2007, 23:00 (il y a 6299 jours) @ thegambler

Air liquide est une belle société à la croissance rentable régulière. Mais que l'on s'entende bien. C'est un investissement de type "père de famille", qui est correctement valorisé, voire chèrement valorisé, et qui ne peut être rentable avec quasi certitude qu'à horizon long (càd au moins 8-10ans). En deça, par exemple 5ans, il y a des chances importantes pour qu'Air Liquide ne soit qu'un placement médiocre. Cela surviendrait, si les taux des obligations à LT s'exhaussaient et que les multiples de capitalisation s'ajustaient à la baisse en raison d'un fléchissement de la croissance mondiale. Investir dans Air Liquide n'est raisonnable au cours actuel que si l'on ne mise que sur les qualités fondamentales de la société et que l'on est prêt à rester investi très longtemps. En deça, il faut bien avoir conscience que malgré les qualités défensives de la société, des risques existent quant à son titre qui est loin de présenter les mêmes qualités, malgré son actionnariat pour la seule raison qu'il est déjà bien valorisé aujourd'hui et qu'il anticipe largement les très bons résultats futurs.

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Graham

la société oui, le titre non

par Bimbo, mercredi 22 août 2007, 07:05 (il y a 6298 jours) @ Graham

» Air liquide est une belle société à la croissance rentable régulière. Mais
» que l'on s'entende bien. C'est un investissement de type "père de
» famille", qui est correctement valorisé, voire chèrement valorisé...


... chèrement valorisé >>>

A développer ;-) Je vois un titre qui réplique quasiment le cac depuis 5 ans (sorte de LVMH). A croire que ...:-)

la société oui, le titre non

par doc crm, mercredi 22 août 2007, 17:58 (il y a 6298 jours) @ Graham

Bonsoir Graham, bonsoir tout le monde.
Air Liquide (j'en ai depuis 2004) représente 21% de mon portefeuille actions global avec une plus value actuelle de 23% (prix de revient unitaire de l'action à 74,24). En effet il s'agit d'un investissement long terme, à risque, mais qui correspond à mon tempérament. Je trouve aussi que la valeur est bien valorisée, j'aurais renforcé justement si la chute récente l'avait entrainée sous 75 euros. Je compte la vendre au-dessus de 135.
Ce qui m'a séduit est la part importante donnée à la communication, la sincérité -du moins je le crois- des propos tenus par différents dirigeants de cette société dont le capital est détenu à 38% par des particuliers.
Mais tu l'as justement rappelé on comprend surtout ce que l'on veut bien entendre. En tout cas le but est d'avoir un revenu régulier fourni par les dividendes relativement généreux et les distributions d'actions (il n'y a rien de gratuit) tous les deux ans. Il s'agit d'une action, c'est un pari plus risqué que les autres produits tel que l'assurance vie ou, mieux, le livret A mais le risque en vaut la chandelle sur du moyen-long terme comme tu le dis.
Cordialement pour continuer la discussion.
Doc

exemple

par Graham ⌂ @, mercredi 22 août 2007, 19:22 (il y a 6298 jours) @ Graham

Je propose un petit exemple qui ne vaut pas pour preuve mais pour démonstration de la prudente défiance qu’il faut garder à l’entour de tout titre affecté d’un important multiple de capitalisation. Ce multiple peut être justifié fondamentalement en raison des perspectives à LT mais il comporte intrinsèquement un risque fort de correction à échéance courte ou moyenne dès la moindre déception sur les projections anticipées.
Cet exemple sera tempéré par la considération que les activités d’Air Liquide ont un caractère intrinsèquement très défensif.


Données approximatives prises en compte :
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-Le passif circulant et l’actif circulant d’Air liquide s’équilibrent approximativement. En conséquence, on n’en tiendra pas compte.
-On négligera les provisions inscrites au bilan
-L’endettement net au 30/06 correspond à environ 4800m€
-La capitalisation Boursière au cours de 91€ s’élève environ à 22.000m€
-La valeur d’entreprise au même cours s’élève à environ : 26.800m€
-La croissance du CA à LT est en moyenne de 8% à 9%. Celui de 2006 s’élevait à environ 10.950m€
-La croissance à LT du résultat d’exploitation est en moyenne identique à celle du CA et correspond à 14%-15% du CA.
-Le dividende représente environ 50% du résultat net et croît à LT dans des proportions identiques. Dernièrement celui-ci était de 2€ par action.
-La réduction du nombre d’actions en circulation est estimée à 2,5% par an.
-Le taux des OAT à 10ans est d’environ : 4,3%
-La capitalisation Boursière au cours de 91€ s’élève environ à 22.000m€
-La valeur d’entreprise au même cours s’élève à environ : 26.800m€

le dernier résultat d’exploitation est de 1.661m€. La valorisation du dernier résultat d’exploitation par rapport à la valeur d’entreprise s’élève à un taux approximatif de 6,2% (multiple de capitalisation de 16 fois le rex rapporté à la VE), soit à peine 1,9% de plus que le taux des obligations à LT.

Hypothèses :
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On se fixe une échéance de 5 ans.
On supposera :
-que le dividende versé sera augmenté de 10% chaque année. Au bout des 5 ans, 13€ auront été versés à l’actionnaire
-que la croissance du CA et du résultat d’exploitation continue à croître d’environ 9% par an.
-que la marge d’exploitation reste à un niveau de 15% du CA
-que le nombre d’actions annulées s’élèvent à 12% : il resterait environ 213.000 titres en circulation.
-que l’endettement net aura reflué vers 3000€

On supposera la réalisation d’un mauvais scénario macroéconomique :
-le rehaussement des taux à LT à 6% (ce qui est envisageable s’il n’y a pas de récession et que la croissance mondiale reste soutenue avec une montée de l’inflation)
-une augmentation de la prime de risque sur le titre de 1,9% à 3%

Résultats
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A l’issue des 5 ans on obtient :
-CA : 16.850m€ (hypothèse de croissance du CA de 9% annuel)
-REX : 2.530m€ (hypothèse de marge de 15%)
-multiple de capitalisation : (prime de risque affectée à l’action+taux des obligations à LT)^-1=(0,03+0,06)^-1=11,1
-valeur d’entreprise : ((multiple * REX)-endettement net subsistant)/nombre de titres à l’échéance=((11,1*2.530)-3.000)/213.000=118€
Au 118€ de valorisation de l’action, on rajoute les 13 euros de dividende et on rapporte l’ensemble à 91€. On obtient une rentabilité brute de 7,6% annuelle.

Commentaires :
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Cette rentabilité n’est pas négligeable mais elle n’est pas exceptionnelle. Elle semble presque être garantie tant les résultats d’Air Liquide sont habituellement stables et prévisibles. Cette projection, bien sûr, comporte des éléments négatifs qui peuvent ne pas survenir. Cependant, elle me semble assez raisonnable dans un contexte de hausse des taux à MT et d’augmentation des primes de risques en raison des incertitudes économiques. On peut aussi envisager bien pire. Mais ce serait par trop alarmiste et injustifié. Cet essai ne vaut pas pour preuve. Il ne vise qu’à montrer que quelques soient les caractéristiques économiques d’une société, des phénomènes exogènes (hausse des taux à LT, changement de la façon de rémunérer les actifs risqués) peuvent influencer la valeur des titres qui représentent ces sociétés. A terme court ou moyen, mêmes les meilleures sociétés risquent de n’être que des placements ordinaires. L’Oréal, ces 8 dernières années, en a été un parfait exemple.
Ceci dit, cela n’enlève rien à l’intérêt d’être placé dans Air Liquide. En effet, à plus LT, ces phénomènes exogènes ont tendance à être complètement lissés. Il reste alors pour l’essentiel la performance capitalistique, c'est-à-dire la rentabilité des fonds propres. Il est à parier que à horizon long (10 ans) Air Liquide offre une rentabilité annualisée au moins égale à 12% (rentabilité des capitaux propres moins une légère décote due à la bassesse actuelle des taux à LT qui ne devraient pas rester durablement aussi bas en l’état). D’autre part Air Liquide est une société d’une merveilleuse régularité économique. L’investissement dans ce titre à LT ne présente quasiment aucun risque de perte pour une bonne rentabilité quasi assurée. Je ne cherchai par là qu’à bien insister sur un point fondamental : l’investissement boursier ne doit s’entendre qu’à très long terme. En deçà, trop de choses influent qui n’ont rien à voir avec la performance réelle des sociétés pour en faire des placements éminemment risqués. On le voit par ce rapide exemple. On l’imagine mieux pour des sociétés aux performances plus instables et moins assurées.

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Graham

belle analyse !!

par lisag, mercredi 22 août 2007, 22:54 (il y a 6298 jours) @ Graham

»impressionnant

tu es prof deconomie , analyste financier >

combien de temps pour tous ces calculs >
»

exemple

par DOC CRM, jeudi 23 août 2007, 09:01 (il y a 6297 jours) @ Graham

Merci et félicitation Graham pour cette démonstration : il s'agit, en effet et pour l'instant, d'une valeur aux risques maitrisés mais qui autorise parfois des prises de profit dans le cadre de tempête boursière comme celle qui vient de souffler sur les marchés (sous 88 la semaine dernière, allant dépasser les 92-93 cette semaine !!) sans aucun rapport, comme tu le dis, avec les fondamentaux de la société.
Encore bravo et c'est sincèrement pour moi une richesse que de lire ce type de message que l'on peut en effet assimiler à un cours certe compréhensible par le néophyte que je suis mais néanmoins magistral

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Du pur Vernimmen!

par jmp ⌂ @, Boulogne/Mer, jeudi 23 août 2007, 11:07 (il y a 6297 jours) @ Graham

Je l'ai lu mais je dois dire que ça ne m'a jamais inspiré. Tout est raisonnable et calculable dans le Vernimmen. Le problème, c'est que la bourse ne l'est pas. Comme livre de chevet, j'aime mieux Mandelbrot.;-)

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jean-marie

compléments

par Graham ⌂ @, jeudi 23 août 2007, 14:17 (il y a 6297 jours) @ Graham
édité par Graham, jeudi 23 août 2007, 14:25

Vos remarques sont gentilles. Il faut relativiser cependant. Cela reste du bla-bla.
On aurait pu tout aussi bien poser comme hypothèses :
-croissance du CA sur 5 ans de 10%
-marge d’exploitation à l’issue : 15,5%
-les autres termes (réduction de capital, dividendes, taux à LT, prime de risque, endettement net) inchangés
On aurait eu pour résultat un retour sur investissement de 206€, soit une rentabilité brute annualisée de 17,7%
Ou bien encore comme autres hypothèses :
-croissance du CA sur 5ans de 8%
-marge d’exploitation à l’issue de 14%
-endettement net, dividendes, réduction de capital inchangés
-taux des obligations à LT : 6,0%
-prime de risque : 3,5%
Ceci afin de prendre en compte, les risques de ralentissement de l’activité en raison des incertitudes actuelles. Le résultat est bien différent : 110€ par action soit une rentabilité brute annualisée d’environ 4%.

Or, il est impossible d’anticiper avec exactitude à cette échéance, le taux de croissance du CA ainsi que la marge d’exploitation et moins encore le taux des obligations à LT à cette échéance et le niveau de prime que voudra bien mettre le marché alors. La plage de résultats prévisionnels est large, d’un gain de 110€ par action à un gain de 206€ par action. Il y a fort à parier que nous nous siturons à l’intérieur avec une probabilité plus élevée vers le haut de cette plage. On dira qu’avec de tels écarts, on ne peut pas prendre de décision fiable. C’est vrai si l’on raisonne à court ou moyen terme (en deçà de cinq ans) parce qu’à des échéances si réduites les influences exogènes à la société (comportement du marché : prime de risque attribuée aux actions comparativement aux obligations, déception/satisfaction particulières sur tel titre précis) produisent des effets au moins aussi importants sinon plus que ceux issus des résultats. A plus LT, ces influences exogènes ont tendance à être lissées. Bien évidemment, il est encore plus malaisé d’essayer de projeter ce que sera l’état de la société à une échéance plus éloignée. La plage de résultats devra être élargie. A contrario, la marge d’effets exogènes sera réduite, on pourra l’estimer autour de 30% de part et d’autres des estimations que nous auront faites (prenant bien en compte qu’à LT, il est plus fortement possible que les taux longs et les primes soient augmentés, donc que nous soyons dans le bas de cette plage). De cette façon, à très long terme, la rentabilité du placement tendra vers celle des capitaux propres de la société avec une marge d’erreur de +/-20%. Dans le cas d’Air Liquide à horizon de 10 ans, en supposant la perpétuation d’une rentabilité des fonds propres de 15%, on peut estimer sans grand risque d’erreurs que la rentabilité de son placement à 10 ans oscillera entre 12% et 17% par an à cette échéance. Ce qui est appréciable. On saisit, pour l’investisseur prudent, l’intérêt du placement dans Air Liquide :
-l’activité est en croissance régulière et est peu sensible aux aléas macroéconomiques
-la valorisation de la société est élevée mais offre de bonnes garanties à échéance courte (5ans) pour des perspectives de rentabilité à LT (10ans et plus) appréciables (12% à 17% par an)
On pourra rajouter toutes les autres qualités propres à la société (actionnariat stable et fidèle, respect des minoritaires, bilan sain, marges importantes, communication excellente, etc.).
Le risque sur Air Liquide n’est quasiment qu’un risque de marché consécutif aux comportements imprévisibles des acteurs de ce marché (investisseurs, banques centrales). Ce risque peut avoir des effets maximaux à échéance courte (en deçà de cinq ans) mais se trouve résorbé à plus LT.

J’ai voulu illustrer par cet exemple combien le risque action sur des échéances courtes (inférieures à 10 ans) pouvait être considérable. Il dépend essentiellement de phénomènes exogènes imprévisibles (niveau de prime de risque, niveau des obligations à LT). Plus les multiples de capitalisation sont élevés et plus le risque est grand sur de telles échéances. Ce qui ne signifie pas qu’il ne faut pas payer cher ce qui est de qualité. Il est concevable de payer à un fort multiple des sociétés présentant des qualités exceptionnelles (se souvenir de Microsoft, Google, etc. il y a quelques années). Cela signifie seulement qu’à horizon de cinq ans, en raison du contexte (risque de ralentissement mondial, risque de hausse des taux, risque d’augmentation des primes de risque), il convient d'être très circonspect envers les sociétés affectées de forts multiples dont les résultats et les prévisions ne sont qu’hypothétiques. De très fortes corrections sur certains titres, dont quelques uns souvent cités sur les forums boursiers, sont encore à attendre. J’ai tendance à croire que le marché à court et moyen terme tendra de plus en plus encore vers la qualité et effectuera des arbitrages abrupts. Il est également envisageable à échéance moyenne que l’ensemble du marché voit ses primes de valorisation abaissées. Ce qui peut avoir une légère incidence sur la catégorie action à moyen terme , compensée par les effets de la croissance, mais n’aura aucune incidence à LT. Volontairement, dans tout ces commentaires, j’ai omis d’évoquer la possibilité d’un fort ralentissement, voire même d’une récession. Il faut garder à l’esprit que ces possibilités sont envisageables et, qu’elles se réalisent ou non, elles continueront d’affecter à échéances courtes et moyennes l’ensemble du marché.

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Graham

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